« A moi il y a un an, je me dirais, “Investis dans ton équipe. »

On vous l’accorde: la vie d’entrepreneur, ca peut faire rêver, et on est les premières à  L&F à essayer de vous inspirer, avec nos portraits de créateurs d’entreprise. Mais tout ce que vous ne voyez pas derrière ces histoires ce sont les difficultés, les échecs, les doutes qu’ils ou elles ont pu rencontrer durant leur parcours du combattant ! On a alors décidé de vous dévoiler la face cachée de l’entrepreneuriat dans cette rubrique sur les entrepreneurs de Labneh&Facts, un an après ! Découvrez les leçons qu’ils ou elles ont pu tirer de cette aventure. Car dans chaque épreuve, il existe plein d’opportunités !

On commence par Omar Itani, le co-fondateur de FabricAid, star de l’entrepreneuriat social au Liban 🙂

Omar Itani est le co-fondateur de FabricAID, une organisation qui collecte et distribue des vêtements de deuxième main.

Reporting et écriture: Rachel Notteau
Edition: Labneh&Facts

Photo by Rachel Notteau

L’histoire de FabricAID

« Un jour, je me suis rendu compte que les vêtements que ma famille donnait au concierge de l’immeuble finissait souvent à la poubelle, parce qu’ils ne convenaient pas à leurs besoins.

En décembre 2016, j’ai lancé un appel à contribution  sur Facebook pour donner des vieux vêtements à des gens dans le besoin, j’ai collecté 200 kilos de vêtements, que j’ai redistribué à des familles en fonction de leurs demandes! Je me suis rapidement rendu compte que les ONGs avaient du mal à gérer la collecte et distribution de vêtements usagés, car le processus est compliqué et demande une infrastructure spécifique. Ce qui explique que moins 5% des vêtements donnés sont collectés.

Pourtant, 2,5 millions de personnes qui habitent au Liban n’ont pas les moyens d’acheter des vêtements de première main, et se fournissent dans près de 250 magasins qui importent des vêtements usagés, souvent de mauvaise qualité.

 C’est ainsi qu’est venue l’idée de FabricAID, pour répondre à ce double besoin.

Le concept de FabricAID 

Nous collectons les vêtements donnés soit auprès d’ONGs ou d’entreprises, soit dans conteneurs bleus qu’on a installés au Liban pour les récolter.

Nous revendons dans les marchés ou nos propres boutiques les vêtements qui sont de bonne qualité à prix abordables (entre 0 et 2 dollars) aux personnes dans le besoin, qui peuvent ainsi choisir leurs vêtements.

Nous recyclons les vêtements de moins bonne qualité pour les utiliser dans la construction ou l’ameublement. Ou nous les envoyons en gros à des magasins de vêtements de seconde main.

Où en était FabricAID il y a un an

A l’époque nous ne faisions que récolter les vêtements. Notre objectif était de réussir à les revendre, et nous avons réussi ! Nous avons vendu 40 000 vêtements en un an, nous n’en espérions pas tant ! Aujourd’hui,  je pense que nous sommes la 1ere association au Liban dans la revente de vêtements en bon état aux plus nécessiteux 🙂

Où en est FabricAID aujourd’hui 

Cette année notre objectif est de collecter 100 tonnes de vêtements pour vendre 200 000 pièces. Nous voulons continuer de vendre des vêtements aux plus démunis !

Photo: Rachel Notteau

La plus grande difficulté de l’année

La trésorerie ! Mon co-fondateur Hussam (20 ans) et moi (23 ans) sommes très jeunes. C’était donc très difficile de gérer l’argent. En 2018, nous avons eu des problèmes de trésorerie durant six mois ! Nous avions agrandi l’équipe, nous devions donc payer les employés, les charges d’électricité etc, mais les caisses étaient vides. Nous n’avions pas encore reçu l’argent des compétitions et nos ventes de vêtements ne suffisaient pas à couvrir nos frais. On manquait donc de cashflow !

Comment vous l’avez surmontée ?

Pour payer les employés et les charges, nous avons emprunté de l’argent à nos proches (qu’on a rendu très rapidement). C’était épuisant de trouver de l’argent, mais nous ne nous sommes jamais découragés. Et finalement, nous avons reçu l’argent de quelques compétitions (pas toutes). Puis l’hiver est arrivé, donc les ventes ont repris, car les gens avaient besoin de s’habiller chaudement. Le problème de trésorerie est maintenant résolu. Malgré cette grande difficulté, je n’ai jamais voulu laisser tomber FabricAID. Il faut toujours rester positif !

Quelle leçon avez-vous apprise ?

Personne n’a de super-pouvoirs, personne n’est super-intelligent ! Mais la motivation et l’énergie sont essentielles pour que la start-up fonctionne.  Il faut se démener pour obtenir de l’aide, avoir de l’information, les réponses à ses questions… Personne ne va venir à nous pour nous aider. C’est à nous, les créateurs d’une entreprise, d’obtenir ce dont on a besoin. 

Il faut aussi accepter les critiques, et pour cela, la modestie est très importante. Quand un entrepreneur donne des conseils il faut l’écouter, et respecter son point de vue. C’est ce qui fait progresser une entreprise. En gros, pour que son entreprise fonctionne il faut être positif, humble et beaucoup travailler. Et il faut aussi recruter les bonnes personnes et faire en sorte qu’elles travaillent bien ensemble.

Qu’est-ce que vous aimeriez vous dire à vous-même il y a un an?

La priorité, c’est l’équipe, et les relations entre ses membres.

Et apprend à gérer la pression! On a pris des risques l’année dernière en embauchant beaucoup de monde, et ça nous a mis beaucoup de stress! Mais on a réussi!

Même si la situation est difficile, il faut toujours y croire, et travailler plus. 


Et maintenant ?

Aujourd’hui, il faut qu’on augmente le nombre de bennes pour récolter les vêtements. A la fin de l’année, je voudrais qu’il y ait 100 bennes au Liban (aujourd’hui il y en a environ 45). On est sur la bonne voie. Il y a un an, il n’y avait aucune benne disponible. Elles ont été installées au  début du mois de mai 2018. 

Et nous voulons augmenter nos ventes ! On ouvre un magasin à Tripoli en septembre.

Plus on vendra, plus on pourra aider les gens à bien s’habiller et se sentir bien dans leur peau, ce qui est notre objectif ultime 🙂 

FabricAID en bref

Date de création de la startup :  enregistrement en octobre 2018
Statut de l’entreprise : SARL 
Nombre d’employés il y a un an : 4
Nombre d’employés aujourd’hui : 18